De la rencontre du père à l’indépendance

Dans notre société en transformation, les places de chacun sont profondément bousculées. Cela touche particulièrement les rôles parentaux, pouvant nous faire croire qu’à l’extrême ces rôles ne sont que des conventions socio-culturelles qui pourraient être interchangeables. Pourtant toutes les recherches sur l’enfant le confirment le bon sens : les deux rôles sont profondément polarisés, à la fois par notre biologie et par notre psychologie. L’enfant attend de chacun des clés et des actes différents.

Les parents

Tous les mammifères ont un instinct parental puissant. Ainsi les parents, indépendamment de leur savoir intellectuel, vont être saisis par l’archétype « Mère » ou « Père » en face de leur bébé. Ce déclenchement de la fonction parentale est incroyablement influent, il agit même dans des relations inter-espèces.

On voit par exemple dans la nature, des animaux prendre soin de petits d’une autre espèce. Et lorsque l’enfant pleure, le chien vient faire le bon parent à côté du landau. La nature a donc prévu que le petit ait ses besoins satisfaits par les adultes qui l’entourent. Par la suite, celui-ci découvre que les forces agissantes chez ses parents sont des forces spirituelles présentes autour de lui. Ainsi, lorsque les besoins de l’enfant sont naturellement remplis par des parents, il pourra ensuite ressentir les archétypes qui le guident et le nourrissent autour de lui.

L’enfant doit donc être entouré par au moins deux acteurs, l’un féminin et l’autre masculin, qui vont être investis de ses archétypes parentaux, sachant plus ou moins bien jouer leur rôle. Nous avons besoin d’un parent qui dit « Non » et un qui dit « Oui », un qui fait la structure et un qui fait l’amour, un qui dit « Vas y fonce », l’autre qui dit « Prends soin de toi ».

Le père permet une ouverture sur le monde avec confiance

Pendant la grossesse, le père attire déjà l’attention du bébé vers la périphérie au travers de sa présence ou de sa voix. Par sa simple existence, le père détache le bébé de la mère. De plus, étant moins lié organiquement, il saura amener chez l’enfant de la distanciation face à ses problèmes de jouet cassé, de bobos ou autres difficultés quotidiennes.

L’enfant a besoin d’aide pour dépasser le drame et remettre les choses en perspective. Le père va d’une part, apprendre à l’enfant à ne pas être obnubilé par les détails affectifs de sa vie et à ouvrir son regard sur une dimension plus grande. Il va d’autre part, valoriser la capacité de l’enfant à surmonter les obstacles, lui faisant contacter sa force et trouver une confiance en lui au travers des difficultés et des jeux que la vie lui présente. Il entraîne l’enfant à la découverte du monde. En polarité avec la Mère qui va spontanément protéger le fragile, consoler, le Père va stimuler le pouvoir de l’enfant à se confronter au monde et à surpasser les épreuves.

Parole du père, enfant libre

Il est assez flagrant de constater combien les paroles du Père sont écoutées et actives. Par exemple au coucher, alors qu’à chaque commandement de la Mère d’aller au lit, l’enfant a pu trouver un dernier besoin (pipi, à boire,…), une seule phrase du Père induit souvent une mise en oeuvre instantanée. De plus, par sa parole, le père structure les données, et explique le monde à l’enfant. Il lui apprend à comprendre, à développer une clarté structurelle et à anticiper. Son discours va donner des clés et des cartes, pour qu’il sache aller à l’aventure ou intégrer les difficultés. Il ne s’occupe pas tant du contenu que de la cohérence et de la structure.

Par exemple, une patiente raconte que jeune fille elle a été agressée par un pervers dans un parking. Rentrée à la maison toute émotionnée et elle l’a dit à ses parents. Heureusement le père lui a dit « Tous les hommes ne sont pas comme ça, cet homme est malade. » Cette phrase l’a libérée. Bien sûr, le père doit pouvoir consoler, mais l’enfant a besoin qu’il pose des repères, des limites et des valeurs qui lui permettent de s’orienter et d’agir.

Des valeurs au projet de vie avec le père

Vivre sans vision et sans accomplissements cohérents est difficile. L’enfant a besoin d’avoir la certitude que ce qu’il fait est bien et qu’il y a une direction pour sa route, claire et sans ambiguïté. Le père va donner quelque chose qui va être non pas la base, mais le projet, non pas la capacité à être vivant, mais la capacité à grandir, évoluer (ex-voltere, sortir de la roue, du cercle), aller dans l’inconnu… volontairement. Le père différencie ses enfants, il voit chaque enfant dans son potentiel et dans son unicité. Il les reconnaît et contribue à mettre en évidence leur idéal de vie. Le père élève, dans le sens le plus propre du terme, il donne une valeur.

Le travail sur le père en Psychologie Biodynamique

La Psychologie Biodynamique a développé à la fois des grilles de diagnostic et des outils pour travailler sur les traces laissées par les défaillances parentales. Elle connaît les zones d’impact de ces fonctions sur l’organisme de l’enfant, à la fois au niveau physiologique et psychologique. Par exemple, pour suivre le père dans le monde, l’enfant a besoin de ses jambes plus que de ses bras, qui sont plus utilisés pour prendre ce que la mère donne. La qualité des muscles des jambes d’une personne nous raconte, en partie, l’histoire relationnelle avec son père.

A partir d’un diagnostic, un travail en massage ou en mobilisation corporelle peut être développé. A un autre niveau, nous pouvons voir par exemple que les absences de clarté mentale, de projets, une difficulté à aller dans l’inconnu, sont liées à la relation avec le père. Le thérapeute pourra proposer des visualisations, des mises en situation, un travail sur la voix ou sur la posture pour venir travailler la défaillance paternelle. Il cherchera à mettre le patient en contact avec son archétype « père » afin qu’il puisse le trouver dans le monde.